Il est fort probable que d’ici
quelques décennies, l’on dise du français que c’est du patois. Ce n’est pas une
assertion pessimiste, ce n’est qu’une probabilité, mais tout se met en place
pour cela. Nous devrions alors y arriver car les lois actuelles n’y participent-elles
pas ? Mais peut-être qu’une probabilité supplémentaire de catastrophe va
susciter un réveil, un sursaut fécond qui ouvrira sur de nouvelles voies !
En effet, toute l’Europe (et
ailleurs aussi) est atteinte de glottophagie ; pour ne pas être en retard
sur ce phénomène, la France veut angliciser ses universités !
Une démocratie n’empêche pas
les hégémonies de toutes sortes car le système permet au plus fort de s’imposer
dans la douceur d’une illusion portée par les diverses installations insidieuses
qui dictent à notre comportement l’attitude qu’il est bon d’adopter. Sous
prétexte d’attractivité, on se met à genoux devant son adversaire, on le sert
et on se dessert. Cette séduction se paie le droit de se dépouiller d’une
partie de son patrimoine pour être à tout prix dans une contemporanéité qui
veut conjuguer la mode avec un avenir soi disant prometteur. L’article entend,
dans un premier temps, interroger les réactions des associations, des
enseignants et de tous les défenseurs de la langue française face à la loi
Fioraso[1].
De telles mesures auront un impact social et culturel profonds sur notre
société. Aussi, on se demande de quelle manière la société civile peut limiter
les dégâts causés par les élus au nom du progrès, de la compétitivité ou d’un
autre prétexte digne d’une mauvaise comédie burlesque. Quelle est la
crédibilité d’un gouvernement qui semble atteint par le syndrome de Stockholm?
Nous affirmons que parler désormais de diversité culturelle et linguistique
quand un pays accepte de prendre la langue de l’envahisseur, frôle
l’hypocrisie.
C’est, en quelques mots, l’arrière-plan de
notre proposition principale : Aucune langue nationale n’a la vocation
d’être une langue internationale sans porter atteinte aux autres langues. Il
existe pour cela depuis 125 ans une langue par essence internationale :
l’espéranto.
Par conséquent, l’article
s’interroge, dans un deuxième temps, sur cette alternative à l’anglais,
conscient que les phénomènes d’acculturation, d’enculturation risquent de nous
faire tous parler un néo-pidgin.
Quand
commencera-t-on à prendre en considération la dimension linguistique avec le
même sérieux accordé jusqu’à présent à la dimension culturelle et
économique ?
L’heure n’est-elle pas venue
de se poser la question sur le choix d’une langue commune qui ne nous imposera
pas l’abandon de la richesse des langues nationales ?
Isabelle NICOLAS, le 28 avril
13
[1]
Les meilleurs défenseurs du français ne sont pas dans l’hexagone, ils sont au
Québec, en Afrique, répartis sur les 5 continents. L’espoir réside aujourd’hui
chez ceux à qui on a imposé le français hier. Le sort est toujours ironique.
Peut-être que demain les anglophones défendront le français car ils trouveront
que leur anglais n’est plus celui de Shakespeare mais un pidgin sans saveur